25 avril 2018

Chronique My Book Box #3 : Les douzes tribus d'Hattie d'Ayana Mathis



Ayana Mathis




Quatrième de couverture 


Gare de Philadelphie, 1923. La jeune Hattie arrive de Géorgie en compagnie de sa mère et de ses sœurs pour fuir le Sud rural et la ségrégation. Aspirant à une vie nouvelle, forte de l'énergie de ses seize ans, Hattie épouse August. Au fil des années, cinq fils, six filles et une petite-fille naîtront de ce mariage. Douze enfants, douze tribus qui égrèneront leur parcours au fil de l'histoire américaine du XXe siècle. Cette famille se dévoile peu à peu à travers l'existence de ces fils et de ces filles marqués chacun à leur manière par le fort tempérament de leur mère, sa froide combativité et ses secrètes failles. Les Douze Tribus d'Hattie, premier roman éblouissant déjà traduit en seize langues, a bouleversé l'Amérique. Telles les pièces d'un puzzle, ces douze tribus dessinent le portrait en creux d'une mère insaisissable et le parcours d'une nation en devenir.


Pourquoi ce choix ? Donnons la parole à Mélanie !


Pour être honnête, la première raison de notre choix fut l'attrait, pour ne pas dire l'amour, que nous avons pour les éditions Gallmeister : nous sommes vraiment impressionnés par le remarquable travail effectué par cette maison d'édition, qui allie des choix éditoriaux d'une incroyable qualité à un véritable travail sur l'objet-livre en lui-même (nous avons d'ailleurs sélectionné à nouveau un de leurs épatants titres, Les grandes marées de Jim Lynch, en premier choix de notre box "Histoires d'eau"). Nous dévorons donc tout ce que nous pouvons de cette maison d'édition, et c'est ainsi que nous avons découvert "Les douze tribus d'Hattie" d'Ayana Mathis. Dès les premières pages, nous avons senti que c'était le moment que nous adorions, celui où nous découvrons un petit bijou, en nous disant tout au long de la lecture que nous avons envie - et hâte - de le mettre entre les mains de nos abonnés !
Ce livre est remarquable à plusieurs niveaux : tout d'abord parce qu'il est le fruit du travail d'une jeune auteure, Ayana Mathis, qui a écrit cette merveille à la suite d'ateliers de creative writing (qui font comme chacun le sait l'objet de polémiques en France) - nous vous invitons d'ailleurs, pour en savoir plus sur cette jeune femme, à aller jeter un œil sur son site. Ensuite, nous sommes "tombés en amour", comme le diraient nos cousins québécois, avec le style impressionnant d'Ayana Mathis, qui nous conte la vie d'une femme - Hattie - fuyant au début du XXème siècle la misère et la ségrégation du sud des Etats-Unis pour venir tenter sa chance à Philadelphie, puis celles de ses douze enfants. L'auteure traverse, avec une structure et une force narratives magnifiques, toute l'histoire des États-Unis du XXème siècle, du côté de ceux qui souffrent - et qui luttent. Elle mêle ainsi de façon remarquable histoires individuelles et destin d'une nation.

Notre chronique


A travers les souvenirs de ses enfants et de sa petite-fille, ce livre, construit comme un véritable kaléidoscope, retrace la vie d’Hattie. Chaque chapitre donne la parole à l'un d'entre eux et nous propose un éclairage différent sur cette femme et mère "élusive", autrement dit qui ne se dévoile pas, n'offre pas de marques de tendresse, parce qu'elle n'en a pas le temps. Elle leur prouve son amour en s'occupant de ce qui est le plus urgent, leur bien-être physique, en travaillant avec acharnement pour les nourrir.
"Quand les enfants d'Hattie étaient jeunes, ils l'avaient appelée le Général. Ils pensaient qu'elle l'ignorait, mais elle savait tout sur chacun d'entre eux. Elle sentait leurs âmes frémissantes."
(Page 308)

Nous traversons l'histoire de l'Amérique en découvrant l'évolution de cette famille, de 1925 aux années 1980. En filigrane apparaissent les problèmes de l’Amérique, la ségrégation comme la Guerre du Vietnam vues à travers le prisme des enfants.

Franklin, l’un de ses enfants, soldat alcoolique et joueur, partage avec nous une vision de la guerre du Vietnam saisissante. Entre folie humaine et folie tout court. Les horreurs de la guerre l’amènent un jour, au crépuscule - moment qui provoque chez lui une perte de tous les repères - à perdre pied.
"J'ai déjà effectué des tas de mission, et j'ai l'impression que je ne suis plus tout à fait aussi humain qu'à mon arrivée ici. Je ne sais pas si je peux redevenir comme avant."
(Page 224)

Ella nous donne à voir la ségrégation mais surtout la bêtise du racisme de certains blancs de façon extrêmement crue et touchante.

Ce roman retrace, grâce aux nombreux feedbacks et ellipses narratives, la vie d’Hattie avec toutes ses difficultés. Nous découvrons, par touches successives, tels des clairs obscurs, un personnage complexe, attachant et qui  transmet, à travers son histoire des valeurs universelles. 
« Elle n’était pas âgée au point de ne pas pouvoir survivre à un nouveau sacrifice. »
(Page 319, à environ 70 ans)

La citation de Rita Dove prend tout son sens quand on a terminé la lecture :
« La maison, fermée comme une montre gousset. Ces cœurs cadenassés palpitant à l’intérieur – Elle ne pourrait jamais les inventer. »
Extrait d'Obéissance. 

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